Les médias 100% numériques indépendants en quête de visibilité – en France comme chez nous


En France, une nouvelle initiative a vu le jour pour (tenter de) donner plus de visibilité aux médias de presse indépendants. En l’occurrence, une newsletter lancée par le site Basta!, intitulée “Chez les indés”. Un prolongement donc de l’objectif poursuivi par le portail Basta! qui est, depuis ses débuts, de relayer régulièrement divers sujets, publiés par des médias indépendants pure player – petits ou grands, déjà bien connus ou encore très discrets – afin “d’amener des sujets qui ne sont pas, ou pas suffisamment à l’agenda médiatique”.

 

L’approche est légèrement différente de cette de l’initiative prise par notre association ABiPP qui regroupe une série de médias pure players belges francophones, indépendants de tout groupe de presse.
Nous aussi nous avons un site collectif (vous êtes en train de le consulter) et un “portail” – Tribu Médias. Il 
 relaie chaque semaine un article (pour commencer) des médias
qui ont décidé de se la jouer collectif. Cinq membres de l’ABiPP, à l’heure actuelle, y participent et l’invitation est lancée à d’autres de les rejoindre. 

 

C’est que les constats posés de la nécessité d’une presse vivace, plurielle, pouvant faire contrepoids ou lutter contre les dérives fabriquées sciemment par les réseaux sociaux, ces constats ne connaissent pas de frontière.

Ivan du Roy, cofondateur de Basta!, expliquait le pourquoi dans une récente interview au BondyBlog.fr. Extraits…

“Cela répond à la concentration des grands médias dans les mains de puissances financières, avec l’exemple emblématique de Bolloré. Ajouté à ça leur assujettissement à des revenus publicitaires, il en découle une fébrilité à traiter certains sujets. Il y a besoin de renforcer l’écosystème des médias indépendants. On ne peut pas être non plus 50 ou 100 médias à vivoter. A un moment l’enjeu est journalistique et politique. Quand on se plaint que les enjeux climatiques ne sont pas assez évoqués dans une campagne présidentielle, si derrière il y a des médias indépendants plus forts qui poussent ces sujets, ils seront davantage sur la place publique. Ce qu’on fait influence tout de même d’une certaine manière les médias mainstream. On a tout à gagner à se renforcer.”

Au sujet de la concentration des grands médias – qui, en France, se fait essentiellement “entre les mains de l’élite financière, avec quelques ultra-riches qui possèdent la majorité des médias aussi bien audiovisuels que de presse écrite”:

“Le foisonnement des médias indépendants, à la structure économique assez précaire, répond à cette situation qui est en train de s’aggraver du point de vue du pluralisme de la presse. C’est une demande du lectorat qui ne trouve pas de réponse ailleurs, dans les médias mainstream.

Avant tout, c’est triste que cette pluralité soit en train de disparaître en France. Pareille pour un service public qui n’est pas censé avoir comme ligne directrice des revenus publicitaires ou la course à l’audience et qui doit, de ce fait, avoir la possibilité de se pencher sur des sujets d’intérêts généraux, de produire des enquêtes audiovisuelles.”

Le “Portail des médias libres” et la newsletter, une “alternative aux réseaux sociaux, aujourd’hui principal biais de diffusion des médias indépendants sur le web?”

“En effet, ça répond aussi à une autre problématique qui tourne autour de la diffusion. Aujourd’hui pour les « petits médias » en accès libre, elle se fait majoritairement sur les réseaux sociaux. Vous pouvez faire le meilleur article du monde, si personne ne sait qu’il existe personne ne le lira. Pour ces médias, s’ils se contentent de le publier sur leur site, seuls les lecteurs les plus fidèles y auront accès.

Les réseaux sociaux sont des vecteurs de diffusion des sujets, c’est un peu les kiosques d’aujourd’hui. Sauf que les algorithmes, on le sait aujourd’hui, ont beaucoup évolué et ont beaucoup restreint – pour des critères assez obscurs – la visibilité des médias indépendants. Ça entraîne un déficit d’audience.

Du coup l’idée de “Chez les indés”, c’est de proposer un outil, qui n’a pas la puissance de frappe de Facebook ou d’Instagram, mais qui donne un accès aux différents médias libres qui est le résultat d’un travail de journaliste et non d’un algorithme obscur. Après c’est aux gens de faire le tri. C’est un peu un travail d’éducation aux médias, de se dire « est ce que j’accepte que ce soit un algorithme que je ne maîtrise pas qui choisit pour moi les papiers que je vois passer, ou est-ce que je choisi d’essayer d’autres outils ? » Évidemment c’est une sélection qui a un certain parti pris, mais qui est plus transparente.”



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